Comment fonder sa réputation

1. Structurer pour résumer. Nul doute que vous existez déjà professionnellement. Que vous soyez chef d’entreprise, ouvrier ou même étudiant, vous êtes déjà associé à un milieu professionnel, à un secteur économique, à un métier. Vous n’avez eu besoin de personne pour choisir un cursus, trouver un stage ou monter votre boîte. Mais ça n’est pas de cela qu’il s’agit. Ce dont il s’agit, c’est de donner une autre dimension à votre exercice professionnel. Le but du jeu est de créer un univers autour de votre pratique, de votre approche, de votre spécialisation.

2. Résumer pour exister. Concrètement, c’est inventer un titre ou un pourquoi vendeur, attractif, qui résume votre positionnement et vous fera apparaître comme unique. Ça n’est pas du pipeau. C’est votre message. Alice MILLER (1923-2010), par exemple, était une docteure en philosophie, psychologie et sociologie, chercheuse sur l’enfance et auteur de 13 livres. Mais sur le site qui lui est consacré, figure simplement en dessous de son nom la mention suivante : « Abus et maltraitance de l’enfant ». C’est clair et concis. Ça n’est ni malhonnête ni mensonger. Mais ça frappe l’esprit de l’internaute. C’est la marque de fabrique, qui restera en mémoire.

3. Exister pour être vu. Il n’y a pas de sot métier et, pour cette démarche de visibilité, toutes les professions se valent. Car on peut toujours tirer son épingle du jeu en partant de pas grand chose. Si, sur le papier, un doctorat, un BEP, un CAP, un MBA ou une certification ne sont pas équivalents, dans la vie, tout peut servir de point de départ à la construction d’un empire ou, plus simplement, d’une œuvre. La méthode en trois points qui suit — inventer (1), déployer (2), communiquer (3) — suppose évidemment un préalable, sans lequel la démarche n’a, à la fois, aucun sens et aucune chance de réussite : d’une part, du talent, des compétences, au moins une formation solide, d’autre part, du travail, du courage et de l’initiative.

1. Inventez votre spécialité

4. Un label. Commencez par partir à la recherche de votre fil rouge. C’est l’équivalent professionnel de l’ikigaï, dans mon cas écrire la règle du jeu. Mais il y a mille et une façons de le présenter. Ce peut être un titre professionnel, un slogan, une valeur, une phrase, une question, voire un dessin, une équation, une énigme, une formule. C’est quelque chose qui vous identifie, vous distingue, vous ennoblit. C’est pourquoi, idéalement, ce fil conducteur est unique. Évidemment, c’est plus facile à dire qu’à faire…

5. Une spécialisation. C’est psychologique mais une spécialisation, même purement artificielle, donne toujours l’illusion d’un savoir-faire reconnu, d’une plus grande maîtrise. Par exemple, décidez spontanément de ne proposer vos services qu’à une catégorie de clients à laquelle vous vous intéressez et affichez-le. Ou choisissez de développer une compétence particulière dans tout le panel qui est le vôtre. Ou encore, rassemblez des compétences et expériences éparses puis tendez-les vers un objectif ambitieux. Ou enfin, créez une entreprise qui poursuive ce but-là.

6. Un dénominateur commun. Pour ce faire, parcourez votre CV, notez les mots-clefs qui s’en dégagent, voyez comme vos expériences s’articulent entre elles et cherchez le dénominateur commun. Cette étiquette va résumer votre positionnement commercial, votre valeur ajoutée, votre obsession professionnelle. Bien sûr, selon votre profil, mettre le doigt sur votre spécialité sera plus ou moins évident, particulièrement si vous avez plusieurs centres d’intérêts. C’est le problème du slasheur ou du multipotentiel, pour qui la quête d’un fil conducteur est primordiale.

7. Une évidence. Il faut que votre démarche semble évidente, c’est-à-dire qu’elle colle à votre personnalité. Ne plaquez pas une formule toute faite, même si elle claque, sur votre parcours. Vous devez également apparaître comme légitime (en fonction de vos qualifications, de vos expériences, de votre notoriété). Ainsi, en début de carrière, mieux vaut apparaître plus modeste dans son ambition ou veillez vraiment à la présenter comme un objectif de carrière. Il en résulte que ce label n’est pas tant une vision du passé qu’une projection dans le futur.

2. Déployez votre vision

8. Une ambition. L’objectif de cette recherche est que vous puissiez devenir (et apparaître), avec beaucoup de travail, comme le spécialiste de telle niche, de tel problème, de telle prestation dans votre région ou même en France. Si vous débutez votre carrière, ce fil rouge synthétisera votre ambition professionnelle et pourra évidemment évoluer avec le temps. Si vous êtes déjà plus avancé, elle renvoie à votre positionnement actuel (perçu) ou voulu (visé).

9. Une question. Si vous avez déjà une expérience substantielle derrière vous, faites ressortir la cohérence de votre parcours, la logique de votre cheminement, la clef de lecture de votre cursus. Ne vous focalisez pas sur une énumération de postes ou un agrégat de compétences. D’ailleurs ne cherchez pas une réponse. Cherchez une question. Quel est le grâal qu’au terme de votre carrière vous souhaitez avoir atteint ? Autrement dit, quelle problématique vous proposez-vous d’explorer à travers votre carrière professionnelle ?

10. Des réponses. Votre coup de génie sera d’apporter des réponses à une question que le marché ou le monde se posait1Le marché si vous êtes pragmatique, le monde si vous êtes idéaliste.. Une bonne méthode est de croiser les thématiques, ou d’appliquer une problématique particulière (la communication, l’organisation, la comptabilité, la livraison, la construction) à un domaine ou à un secteur (les associations, les PME, les particuliers, les retraités). Cette question étant posée, il reste à inventer et concevoir les produits, les services, les fonctions, les structures, voire les concepts qui y répondent.

11. Un apport. Pour véritablement exister sur le plan professionnel, ne vous contentez pas d’une solution économique ou commerciale au problème identifié. Donnez lui corps en proposant aussi des réponses sur d’autres plans. En fait, il y a plein de manières de faire vivre votre ambition. Créez des publications (blog, magazine, réseaux, livres), des évènements (des salons, des rencontres, des conférences, des ateliers, pourquoi pas un festival), des formations (un MOOC, une école, un master, un certificat), des projets (un voyage, un défi, une œuvre d’art, un jeu), des partenariats (avec des instituts, des laboratoires, des équipes de recherche, des artistes, des écrivains).

3. Communiquez sur votre univers

12. Une parole. Petit à petit, sans forcément que ça ne soit conscient, ces réponses vont se structurer et former une parole. Elles vont évidement donner un sens — une direction autant qu’une signification — à votre vie professionnelle mais, plus important encore, elles vont ajouter une pierre à l’édifice collectif. Une publicité, un produit, une marque sont des éléments de culture, certes plus ou moins réussis, plus ou moins judicieux, mais dont certains façonnent indiscutablement les modes de vie.

13. Un message. Chacune de ces entreprises, à travers un ou plusieurs produits phare, délivre un message au monde. Pour le meilleur ou pour le pire, l’entreprise est un acte politique, un acte de foi qui engage l’avenir. Même si c’est inconscient. Quoi qu’on fasse, on envoie un message. Vendre un produit ou fournir un service encourage certains comportements, y compris néfastes à la société2La malbouffe, la pollution, la pauvreté, etc.. Dès lors, pourquoi ne pas inscrire l’activité de votre structure dans une dynamique plus positive3La lutte contre l’exclusion ou le réchauffement climatique, l’insertion professionnelle des jeunes, la transmission de savoir-faire par exemple. ?

14. Une vitrine. L’intérêt d’avoir une spécificité, d’être porteur d’un message est aussi de communiquer dessus. Faites-en un élément de différenciation. Vous pouvez bien entendu créer une marque qui soit l’ambassadrice de votre vision. Mais, à un niveau moindre, pour vous « vendre » vous-même, forgez-vous une identité visuelle4Une charte graphique (police de caractère, logo, couleurs, etc.). et rédactionnelle5Un slogan, des valeurs, quelques mots que vous répèterez et qui, au fur et à mesure, s’assimileront à vous dans la tête de vos interlocuteurs. et utilisez ces éléments de communication sur vos supports6Par exemple, sur votre CV, vos cartes de visite ou votre site, pourquoi pas en nom de domaine…. Vous pouvez ranger, dans ce paragraphe, ces mots barbares que sont le personnal branding ou le storytelling de soi7Pour ma part, je comprends mal qu’on veuille se vendre comme un paquet de lessive… Sans doute faut-il avoir, de soi, une piètre estime..

15. Un empire. Outre l’intérêt sonnant et trébuchant, le but de cette démarche est de créer et d’étendre, sur la vaste toile de fond culturelle, un espace mental qui soit votre empire. Mettez toujours votre fil rouge en avant, devant votre expérience, devant vos diplômes et même devant votre nom8Combien d’illustres inconnus sont la « nana » ou le « mec » qui (rayez les mentions inutiles) : réalisa tel film, lança tel produit, inventa telle recette, eu telle idée, créa tel concept ?. Martelez-le pour instiller votre idée dans la tête de votre interlocuteur. Brandissez votre étendard. Développez votre vision. Faites converger toutes vos actions vers ce but. C’est ainsi que vous parviendrez à fonder votre réputation.

Références

Illustrations

  • 1
    Le marché si vous êtes pragmatique, le monde si vous êtes idéaliste.
  • 2
    La malbouffe, la pollution, la pauvreté, etc.
  • 3
    La lutte contre l’exclusion ou le réchauffement climatique, l’insertion professionnelle des jeunes, la transmission de savoir-faire par exemple.
  • 4
    Une charte graphique (police de caractère, logo, couleurs, etc.).
  • 5
    Un slogan, des valeurs, quelques mots que vous répèterez et qui, au fur et à mesure, s’assimileront à vous dans la tête de vos interlocuteurs.
  • 6
    Par exemple, sur votre CV, vos cartes de visite ou votre site, pourquoi pas en nom de domaine…
  • 7
    Pour ma part, je comprends mal qu’on veuille se vendre comme un paquet de lessive… Sans doute faut-il avoir, de soi, une piètre estime.
  • 8
    Combien d’illustres inconnus sont la « nana » ou le « mec » qui (rayez les mentions inutiles) : réalisa tel film, lança tel produit, inventa telle recette, eu telle idée, créa tel concept ?